lundi 31 mars 2014

IInterviiew» CYRIL VIDAL, PDG DU GROUPE (BIOCLIMATEC)

«La puissance de l’énergie verte va créer des milliers d’emplois au Sénégal»

Président du groupe Bioclimatec, Cyril Vidal offre, avec son entre­prise, des solutions «green» pour une indépendance énergétique. Visionnaire et homme de terrain, ce presque quinquagénaire (43 ans) vit et fait vivre le défi vital de la transi­tion énergétique au Sénégal depuis 2 ans. Entretien exclusif pour Quoi de vert ? qui a eu le bonheur humain de côtoyer et d’être accom­pagné par Cyril Vidal, lors de la journée de lancement du magazine. Avec en bandoulière les verbes agir et avancer. Ce passionné de l’éner-gétique depuis l’âge de 17 ans est français de naissance et sénégalais d’adoption. Divorcé et père de deux filles, il fournit tout un gisement d’ap-pareils qui constitue le centre de ses activités professionnelles. Proposant ainsi des services de pointe en matière d’énergie renouvelable.

Quoi de vert ? : Pourquoi le choix du Sénégal comme pays d’implantation de votre groupe ?

Cyril Vidal : A titre personnel, j’ai connu le Sénégal en octobre 2011. Une relation d’amour avec une femme qui est devenue une relation d’amour avec l’Afrique. Le Sénégal est certainement l’emblème de l’Afrique. C’est un pays très stable ; il y a des liens extrêmement puissants entre le Sénégal et la France. Je suis tombé fou amoureux de ce pays, lors de mes quatorze voyages. J’ai choisi le Sénégal comme terrain de défi.

Vous êtes le président du groupe Bioclimatec. Que signifie Bioclimatec ?
Bioclimatec est la contraction d’une synergie de trois mots : la biologie, le climat et la technologie.
Nous sommes dans un environnement qui se doit d’être de plus en plus bio.
«Bio» veut dire de la protection à tout, du développement naturel. Donc bio comme biologie, biochimie, bio... Il y a beaucoup de choses bios. «Clima» comme le climat, parce
que le climat dépend des produits verts.
Tout le monde se dit spécialiste du bio,
mais avant tout, le bio se définit dans un
monde où le climat n’est que la consé-
quence des activités de l’être humain
sur cette terre. Et enfin «Tec», parce
Cyril VIDAL/Cliché Quoidevert
qu’on peut faire de belles choses
avec de la technologie, mais on
doit le faire dans une essence
bio, en dépendance avec le climat,
avec les énergies renouvelables
comme le soleil, le vent et l’eau qui
vont nous l’apporter.

Bioclimatec n’est pas bien connu
du public. Comment définissez-
vous la mission d’une telle structure
dans un pays où les alternatives énergétiques sont à l’état embryonnaire ?

Le défi, c’est d’apporter plus que des capteurs solaires. Parce que tout le monde vend du capteur solaire. J’ai participé au Ve Salon des énergies renouvelables en 2012. J’ai été stupéfait de voir le nombre de vendeurs de capteurs solaires au mètre carré. Or ce dont nous avons besoin, avant tout, c’est de solu­tions. Peu importe que cela soit du soleil, du vent ou autre chose, nous avons besoin de solutions. J’en veux pour preuve les trois semaines sans eau où 70 % de la population de Dakar s’est retrouvée sans eau. Il m’a semblé comme un défi de répondre à cela. J’ai créé une solution indépendante à cent pour cent, pour avoir de l’eau pure. Ici, à la villa Bioclimatec (Ndlr : Lieu où s’est tenue l’interview, dans le quartier de Yoff Layenne, à Dakar).
Vous ne dépendez ni du réseau de la SDE ni de celle de la SENELEC. Comment fai­tes-vous ?
C’est tout simple. Nous bénéficions, en fait, à Yoff Layenne, d’une nappe phréatique qui affleure à 7 m. Donc nous avons percé notre forage à 9 m jusqu’à 11 m. Nous avons posi­tionné notre pompe à 9 m. Tout ça est mis sous pression et alimenté sous une bâche en bois pour éviter le plastique. Nous mettons cette eau en pression, nous la filtrons et la purifions avant de la consommer.
Et depuis deux ans, je bois de l’eau pure sans plastique, sans rien. J’ai le plaisir de la
consommer devant vous.
Aujourd’hui, tout le monde se plaint de la crise énergétique et de la cherté des ser­vices qui s’y rattachent au Sénégal, en Afrique et partout ailleurs. Quelles sont les solutions offertes par votre entreprise pour une efficacité énergétique intégrant la réduction des coûts, puisque nous sommes dans un pays pauvre très dépendant ?
En voie de développement, dirions-nous. Cette crise est la résultante essentielle de la dépendance sur l’énergie fossile.
Nous savons bien que le baril de pétrole va augmenter parce qu’on en a de plus en plus besoin, alors que nous avons des solutions qui sont à portée de main.
Ici, à la villa, nous sommes indépendants à cent pour cent. Pourquoi ? Parce que nous avons des solutions qui consomment très peu d’énergie.
Donc qui consomme très peu, peut être indé­pendant. Nous répondons précisément à un développement conséquent de cela. Un point qui est important, c’est l’agriculture. Il faut que l’agriculture se développe. Du moment où cha­que Sénégalais en se levant le matin pense à se procurer à manger et non pas à travailler, cela reste un frein majeur. Mais pour que l’agricul-ture se développe,
il faut lui donner les moyens. Ces moyens, c’est l’eau ; nous avons de l’eau à moins de 20 m de profondeur. Nous l’avons donc, l’eau.Comment capter l’eau avec de l’énergie ? Comment avoir de l’énergie ? Nous avons du vent, du soleil et d’autres choses ; notamment des groupes électrogènes verts qui peuvent fonctionner à l’huile végétale brute. Je veux une révolution énergétique au Sénégal et partout ail­leurs, en Guinée, c’est possible. Cela ne dépend que de nous.
On n’a pas besoin d’explorer le vent ou le soleil. Les énergies dites renouvelables sont là, présentes, mais le coût d’investissement est lourd. Que répondez-vous à cela?
Le coût d’investissement est assez consé­quent, certes. Ce qu’il faut, c’est de se projeter dans les cinq, dix ou quinze prochaines années. J’ai mis sur pied un département qui s’appelle Bio-Finance, qui est tout simplement du leasing énergétique. Plutôt que d’acheter une solution, par exemple pour une villa, pour une agricul­ture, cela revient aux alentours de neuf millions de francs  ŒA. Si quelqu’un devait me payer ces neufs millions nets en cash, il pourrait en avoir peur ; mais s’il s’agit de lire sur la marge ou le coût d’exploitation qu’il aura, c’est large­ment absorbable. Et pour cela, je travaille avec des organismes de la place et d’autres qui nous suivent.
Vous avez participé à la journée de lance­ment du magazine du développement dura­ble Quoi de vert? Que pensez-vous de ce magazine et quelle leçon retenez-vous de cette journée de lancement?
C’est notre magazine à nous. C’est le maga­zine dont nous avons besoin. Pour tout vous dire, j’ai mis sur pied un département qui s’ap-pelle Biocom. Je rêvais d’avoir avec moi, avec

Bioclimatec, un journal, un magazine pertinent qui va faire prendre conscience. Tout est une question de prise de conscience. A partir du moment où, à notre peuple, nous lui faisons reconnaître, admettre ou penser à avoir cette cer­titude que nous allons révolutionner ensemble l’eau et l’énergie, c’est possible.
Mais ça il faut le faire vivre. Pour le faire vivre, nous avons besoin des acteurs comme vous (Ndlr : Communicants et journalistes). Vous avez une des clés entre les mains.
Face à ces alternatives énergétiques incontournables pour la réalisation d’un développement durable que nous offre votre boîte, pouvez-vous nous parler d’un de vos pro­duits afin que les parties prenantes (citoyens, entreprises, particuliers, collectivités et autres) puissent consommer ce qu’ils produisent, comme le soutien votre slogan ?
Nous, nous disons : «Consommez ce que vous produisez.» La solution la plus pertinente dont nous avons besoin, à l’heure actuelle, c’est l’eau. S’il n’y a pas d’eau, il n’y a pas de vie. Comment pouvoir admettre qu’on ne va consommer que l’eau que l’on peut et non pas l’eau que l’on veut ?
Pour répondre à cela, j’ai créé notre station qui s’appelle «Biopure» qui est composée d’une résultante de solutions par rapport à des soucis.
Le premier souci, c’est le manque de pression d’eau. Il n’y a pas assez de pression d’eau dans le réseau. Ce qui a pour conséquence de créer des boues qui ne peuvent pas être lavées dans les différents niveaux, c’est-à-dire les premiers ou deuxièmes étages. Parfois, il n’y a pas assez d’eau.
Le deuxième souci, c’est le problème de la filtration de l’eau. S’il n’y a pas de pression, il n’y a pas de filtre qui puisse épurer l’eau ; et le troisième souci est lié au stockage. La dangerosité aussi de pouvoir stocker de l’eau dans des bâches, dans des réserves d’eau en plein soleil et de couleur noire. Cela développe des bactéries qui sont mortelles dont une qui s’appelle la légionelle.
Or, si je le sais et que je ne fais rien, cela s’appelle non-assistance à peuple en danger.
Est-ce à dire que l’eau que nous donne la SDE n’est pas une eau de qualité?

Je ne suis pas placé pour juger. Je m’abstiendrai de tout jugement. Ce qui compte, c’est le résultat. Ce que je peux dire, c’est une eau qui est potentiellement bonne, mais qui a besoin d’être accompagné par une performance de filtre et de mise en pression absolument exceptionnelle.
Avec toute cette batterie de solutions existantes, y a-t-il des prémices positives pour
l’accomplissement du «Green Power Energy» au Sénégal ?
Absolument. Il y a des milliers d’emplois à créer, donc à développer. La puissance de l’énergie verte va créer des milliers d’emplois dans ce pays. Mon ami Ali Haïdar (Ndlr : Le ministre de la Pêche du Sénégal) qui à l’époque était ministre de l’Environnement et du Développement durable, était venu visiter la maison verte construite en briques de terre que nous avions installée à la FIDAK (Foire internationale de Dakar). Le ministre avait visité notre stand qui était en terre. Quatre jours plus tard, j’étais dans son cabinet et il m’avait projeté le rêve de créer vingt mille emplois dans ce sec­teur. Sa maison est en briques de terre donc elle consomme deux fois moins d’énergie que la bri­que de ciment. Alors pourquoi nous consom­mons des maisons en briques de ciment ? Parce que nous prenons comme modèle l’Europe. Est-ce que l’Europe est un modèle ? L’Afrique a-t-il besoin du monde ou est-ce que c’est le monde qui a besoin de notre Afrique à nous ? C’est la question que je me pose.
Est-ce à dire qu’actuellement au Sénégal, les autorités ne jouent pas leur rôle d’accompagnement des structures comme la vôtre afin que cette transition énergétique soit effective ?
Je pense qu’elles n’ont pas tout à fait conscience de la puissance que cela va créer. Si elles en avaient vraiment conscience, pour leur réélection personnelle, elles le prendraient à bras le corps.
Si vous avez un message à faire passer pour aller vers une transition énergétique, quel serait-il ?
C’est de prouver ce que nous disons. C’est-à-dire agissons, venez nous voir à notre villa, à votre villa, parce que j’ai plaisir à dire que le soleil ce n’est pas mon soleil, c’est notre soleil, l’eau de la nappe phréatique, ce n’est pas ma nappe à moi, ce n’est pas mon eau à moi, c’est notre eau. Agissons ensemble.
Votre mot de la fin?
Nous avons besoin de vous. Vous avez besoin de moi. Agissons ensemble comme nous le disons. Nous sommes ensemble.
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Propos recueillis par Baye Salla MAR



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