« Il faut qu’à partir de 2017, nous n’importons plus un kilogramme de riz ». Déclarait Macky Sall, lors de sa tournée dans la vallée du fleuve, en octobre 2014.Une évidence, il faut que le Sénégal apprenne à se nourrir tout seul. Et pour ce faire, par l’intermédiaire du ministère de tutelle, le Président souhaite exploiter les dix-huit mille (18000) kilomètres de terres de la vallée. En atteignant une production d’un million six cent (1.600.000) de tonnes de riz en 2017.
L’eau, la terre, et le capital, tels
sont les trois fondamentaux pour réussir
un projet agricole. L’épine dorsale de cette activité repose sur la maitrise de
l’eau. Etat de fait soutenu par le doxa multimillénaire, partagé par
tous : « L’Egypte est un don du Nil ». En effet, si le Nil en
tant que ressource environnementale conditionnait l’activité économique et
sociale de l’Egypte. Les experts de la
SAED le savent, la prospérité de la vallée et du pays dépend de la gestion du
fleuve Sénégal. Au même titre que La maxime égyptienne, ce tentaculaire objectif revient en boucle sur
les médias, dirige la conscience des
producteurs de la vallée. Et se définit comme étant, « la possibilité pour
un pays de subvenir à ses besoins alimentaires de son peuple par sa seule et
propre production». Appliquée au riz, Sera-t-il possible de venir à bout de ce
souhait du Président ? Cette « grande offensive » ou « grand
bond » comme on l’a déjà entendu sous d’autres expressions est - ce
relevable ? Les producteurs
sont-ils en phase avec les dires du chef de l’Etat ? Est-ce une mesure
durable ? Passons au scanner l’état de confiance des différents acteurs
avec ce reportage de quoi de vert mag.
L’abondance
ou l’émergence théorisée par l’actuel président sénégalais « repose sur le
roc de l’agriculture conventionnelle ». Intrants, fertilisants chimiques, herbicides,
station de pompage, conduite des eaux, systèmes d’irrigation de pointe,
tracteurs… tous les moyens sont mis en route pour l’atteinte de
l’autosuffisance en riz sous le drapeau de l’agriculture intensive, dans moins
de deux ans. Pour nous en convaincre, nous avons fait un déplacement à « thilène »
et à « Ndiaye Mberes » dans la vallée du fleuve sénégal pour mesurer l’ampleur de ce challenge
politique.
« C’est
avec ce riz de qualité que l’Etat a opté,
pour atteindre l’autosuffisance alimentaire d’ici 2017 ».
Il
est 16 heures. Après trois heures
(3heures) de route et 270 kilomètres
à notre actif. Nous venons de poser nos valises à Saint- louis. Il nous a fallu
35 kilomètres de plus pour rencontrer notre guide. Avant de prendre la
direction des espaces aménagés, devant accueillir une partie des projets du
défi agricole.
« Dakar
doit acheter le riz national pour faire
chuter les exportations ».
observe Serigne Mansour Diop, conseillé
agricole à la SAED, dans la zone du lac de Guiers, revient sur la chaine des
valeurs, et explique que : « pour la production de riz au
Sénégal, la chaine des valeurs part de la demande de crédit au niveau de la
CNCA, les producteurs au niveau des
unions de bases formulent leur demande de crédit, passé cette étape des bons
sont délibérés en travail des sols, en eau ,en engrais, en semences ;après
les bons. On met en marche les stations de pompage, qui sont gérées par les
producteurs avec l’hydro-location, ils payent
75 .000 Cfa au casier par l’hectare, il y’a aussi un pompiste qui est
engagé par l’union locale. Des tracteurs
(faisant référence aux mille tracteurs
commandés au Brésil) sont mis à leurs
dispositions par l’Etat au moment du travail des sols, les unions de bases
donnent des bons de CNCA aux prestataires de services. Les procédures de mise en eau, les semis,
l’entretien et le suivi des cultures en passant par l’engrais, les
herbicides ; Souvent les difficultés tourne autour du remboursement des crédits. Et il faut les
sensibiliser à rembourser à temps. Et c’est un problème parce que chaque fois
ils ont des alibis mais un diagnostic a permis de comprendre que le riz n’était
pas vendu à temps, ou des soucis d’écoulement. Actuellement la nouvelle
organisation a épongé les dettes et les producteurs peuvent repartir sur de nouvelles
bases.
Nous avons deux types de récoltes à ce stade,
récolte manuel, et mécanisé.
Pour les moissonneuses batteuses elles y’en a pas
trop dans le delta, mais il y’a l’Etat qui promet de renforcer le parc
automobile en moissonneuse batteuse. Après les récoltes battages ; Nous
passons au conditionnement dans certaines zones, on avait constaté le manque de
stockage mais pour cette année l’Etat a construit des magasins de stockage pour
conserver le riz et les cultures de maraichages comme l’oignon, après le stockage,
il y’a la transformation qui est assurée par les prestataires de services, les industrielles,
des privés, qui y’ont des décortiqueuses locales, qui ne sont pas de la
dernière génération et ne contenant pas de trieuse ; Pour les décortiqueuses
standards, nous obtenons du riz de qualité après décorticage donc ce riz de
qualité va permettre aux producteurs d’exporter son riz. S’il le souhaite ou de
vendre dans le marché local donc c’est avec ce riz de qualité que l’Etat à opter, pour atteindre
l’autosuffisance alimentaire d’ici 2017. Dans la chaine de valeur, il y’a aussi
les femmes, qui sont d’un apport incontournable.
Pompiste
de la station de « Mberes » à quelques encablures du pont gendarme et
président d’union à « poolo» Mactar est un producteur d’oignon. Ses terres
s’étendent sur moins d’un hectare.Il y cultive de l’oignon que l’on désigne
sous le vocable de « Ngagne Mbaye », sa production est à 200 sacs,
son prix varie entre 8.000 mille et 10. 000 mille sur le marché.sa culture dure
quatre mois, et le poids des contenants est de 45 kilos,
-
La
maitrise de l’eau, une pierre angulaire :
Les statistiques mondiales, imputent à l’agriculture 70% de la
consommation mondiale. Avec l’explosion démographique, les données mondiales sur
l’eau pour l’agriculture ont été multipliées par six entre 1900 et 1975.
Comme technique pour une meilleure
optimisation de la ressource, l’irrigation .Pratiquée par submersion au
sein de la rizière. Elle se matérialise par différentes phases, pompage, conduite, et
arrosage. Des vannes assurent la
rétention et la diffusion de la ressource vitale au niveau des canaux. Selon
les explications de Mansour DIOP, Elles s’autorégulent par rapport au débit. Et
l’arrosage dépend des besoins elles peuvent libérer entre « 5 litres par
seconde à 50 litres par seconde ».
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La confiance s’installe chez les producteurs
pour nourrir le Sénégal.
Histoire
de mesurer l’état de confiance des
producteurs, il n’existe pas meilleur baromètre que d’aller à la rencontre les acteurs. Il est 18 heures, nous voilà dans les magasins de
stockage de riz de thiélène. Traité après la récolte, la mise en sac s’opère
avec la balance pour peser le sac de 50 kilos qui coute « 14.000 mille Cfa
sur le marché. Tandis que le sac de 25 kilos se vend à 7.000 mille Cfa »
observe Déguène, responsable des lieux.
Pour le président de l’union de thielène, il
existe une très grande différence entre les anciens projets et celui –ci. Il
argue que : « Contrairement à la GOANA de l’ancien
président, nous constatons une très grande différence, l’autosuffisance en
manioc a connu un échec pour la bonne et simple raison qu’on nous avait imposé
cette culture qui nous ait étranger. En ce qui concerne le riz nous sommes
enthousiastes, d’entamer sa culture, car c’est notre domaine. Nous devons vivre
de notre riz, il a plus de qualité que le riz importé. »
A
la question de la commercialisation, il estime que : « il y’avait
trop de résidus, et au même titre que les cars rapides à Dakar, il a fallu
mettre les bus tata en circulation pour alléger le transport ; c’est la
même approche qu’il faut adopter. Il faut récupérer les décortiqueuses
artisanales, et remettre des décortiqueuses standards aux propriétaires. »
« Tous
les moyens sont réunis pour l’atteinte de l’autosuffisance. »
L’état de confiance pour accéder à « l’autosuffisance
alimentaire » en riz est Selon le producteur un objectif à atteindre ; « Car un
paysan sénégalais peut nourrir dix sénégalais. » Soutient Mambeye , avant
notre retour à la ville de saint – louis.
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La sécurité alimentaire : Oui ! Mais
à quel prix ? la mécanisation de l’agriculture et l’introduction à
outrance d’herbicides voire de fertilisants chimiques n’ont-t-elles pas des
conséquences incalculables sur l’environnement ?
L’agriculture
intensive permet l’atteinte d’un certain niveau de rendement. Mais le risque
pour les sols est notoire. Déjà, les aménagistes des terres doivent faire face
au phénomène de la salinisation des terres. Si l’on en croit les propos de Badara, jeune exploitant, et
habitant de thilène : « Des terres aménagées et abandonnées par
la SAED sont toujours dans l’inertie à SANAR». Ce que nous confirme
Mansour Diop technicien de la SAED. Et si l’on sait que : « La perte
de terres arables du fait de la salinisation des sols dans le monde représente
500 m2 par seconde, soit 3 hectares chaque minute et près de 1, 57 million
d'hectares perdus chaque année, souvent de manière irrémédiable ».
L’échéancier agricole entraine l’usage
démesuré de nitrates et des produits phytosanitaires .A l’heure où les pays
victimes de la « révolution verte » restructurent, repensent et
transitent vers d’autres paradigmes agraires. Mettant en corrélation la
production agricole et la protection de l’environnement. Le Sénégal opte pour
l’intensification de son agriculture au risque de perdre ses sols arables, et
de contaminer ses effluents avec de la chimie non maitrisée. Manger sain rime
avec sécurité alimentaire Nous disent les souverainistes.
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Le foncier,
un ingrédient du « syndrome
indien » :
En Inde, 250 000
agriculteurs se suicident chaque année à cause de l’expropriation des terres et
de l’instabilité de l’agriculture, selon le National crime bureau records. Pour
ne pas en arriver là, argue badara « je pense qu’il faut essayer
d’intégrer la vie sociale de l’agriculteur et étudier les paramètres de
solvabilité d’un paysan. Il a comme unique
garantie son champ. Il poursuit : « Durant toute la période
agricole, il s’endette en aval espérant toujours le bon résultat de son récolte
pour payer sans ce résultat escompté. Sa terre est hypothéquée et reprise par
les préteurs », faisant référence à la banque. En deux ans, plus de
cinquante millions d'hectares ont déjà changé de mains. Et des dizaines de
millions d'autres sont en voie d'être cédés. À tel point que l'ONU s'en est
alarmé : le patron de la FAO de l’époque, Jacques Diouf, a dénoncé « le risque
d'un néo-colonialisme agraire ».
Par Pape Mbor